Que dire de son handicap invisible en entreprise ?

80% des formes de handicap relèvent de ce que l'on nomme le handicap invisible, un handicap que les autres ne remarqueront peut-être pas si la personne concernée n'en parle pas. Au moment d'entrer dans l'entreprise, mais aussi au cours de l'occupation de son poste, quelle approche adopter pour évoquer son handicap, notamment quand celui-ci est invisible ?

Si de plus en plus d'entreprises sensibilisent leurs collaborateurs à l'intégration des personnes handicapées et que les dispositifs d'accompagnement se développent, dire son handicap en entreprise peut susciter des appréhensions ou des inquiétudes. Quelle approche adopter pour évoquer son handicap, notamment quand celui-ci est invisible ?

Faut-il évoquer son handicap invisible en entreprise ?

Bien sûr, en tant que candidat ou salarié, vous n’avez aucune obligation d’évoquer votre handicap ou d’en dévoiler en détail la nature auprès de votre employeur.
Néanmoins, informer votre employeur des manifestations de votre handicap et de ses répercussions possibles sur votre santé, c'est aussi lui permettre d'ouvrir un dialogue favorable à votre intégration.

Nul besoin de rentrer dans les détails de votre pathologie, si ce n'est du point de vue de l'impact qu'elle peut avoir sur votre activité. Julien Viaud, chargé d'études à l'Agefiph (Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées), explique que « ce qui doit importer aux entreprises, ce sont les conséquences du handicap sur l'emploi occupé » et que « les questions qui peuvent être posées portent donc sur les contre-indications médicales et les aménagements de poste nécessaires ».

Jessica Thébault est référente au sein d'un dispositif d'emploi accompagné dans le Loiret, (dispositif issu de la loi « travail » du 8 août 2016). Son rôle est d'accompagner des personnes handicapées dans leur intégration à un emploi, à travers un « job coaching » individualisé. Elle plaide également pour une approche pragmatique, se concentrant sur les conséquences concrètes sur l'emploi occupé. D'après son expérience, désigner le nom de sa pathologie présente le risque de se heurter à divers préjugés au sein du collectif de travail : « Si vous dites que vous avez une sclérose en plaques, vos collègues vont sans doute aller chercher la définition sur Internet. Ils risquent alors de comparer avec ce qu'ils voient chez la personne ».

Evoquer les conséquences du handicap sur l'emploi occupé

« Une situation de handicap n'assigne personne définitivement à une place. »

A l'inverse, un silence complet sur ce handicap invisible peut laisser le champ libre à des interprétations erronées au sein de l'équipe, explique la professionnelle : « toutes les fois où les employeurs n'ont pas voulu prévenir le collectif de travail, cela s'est avéré compliqué à un moment ou un autre. Par exemple, si les collègues ne savent pas que la personne est en situation de handicap, ils vont trouver étonnant qu'il ait besoin de s'absenter, et vont penser que la personne est privilégiée ».

Dans le cadre du dispositif d'emploi accompagné, la personne en situation de handicap peut bénéficier d’un « job coaching » individualisé, qui lui permettra une médiation bénéfique au sein de son entreprise. Jessica et ses collègues proposent donc une participation « à chaque étape, pour faire médiation avec l'employeur, notamment quand la personne a du mal à s'exprimer ou à se mettre en avant ».

Enfin, pour ce qui est de l'étape de la candidature, là encore, il n'y a pas de conseil général à suivre en la matière. Selon Julien Viaud, cela peut par exemple être signifié en fin de CV, pour les cas où l'entreprise visée a une politique particulièrement active en la matière.

Vers une société plus inclusive

Le défi actuel, forcément collectif, est donc de faire progresser la culture des entreprises en matière d'inclusion des personnes handicapées. En effet, plus les entreprises –- et donc les salariés qui les composent – seront à même d'envoyer des signaux rassurants sur ce sujet, et plus les personnes handicapées parviendront à s'intégrer durablement dans un emploi.
Selon Julien Viaud, « les personnes doivent pouvoir se dire que ce ne sera pas stigmatisant, que ce ne sera pas communiqué à toute l'entreprise. Cela va sécuriser leur parcours et les aider à envisager sereinement leur évolution professionnelle ». Il y a là une idée à faire progresser, celle selon laquelle une situation de handicap n'assigne personne définitivement à une place. Si le travail à mener pour faire à chacun une place est encore immense, le dialogue sur ces sujets laisse entrevoir la possibilité d'aller vers plus d'égalité.